Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Cher lecteur,

J'avais espéré du soleil, ou au moins un temps sec, mais à mon réveil, Briançon était toujours sous la pluie. Mes vêtements ont mal séché pendant la nuit et la météo n'annonce aucune amélioration. La journée va être pénible... Je prends mon temps pour déjeuner et me préparer, et je pars au sec vers 9h30. Après avoir changé mes patins de freins.

Seulement 7,5km plus tard, sur les premières pentes de l'Izoard (2360m), je fais une pause pour laisser passer une averse. Je repars avec des sensations médiocres. J'ai l'impression de m'être mal réhydraté depuis la veille et je bois donc beaucoup.

Je me fais doubler pour la première fois depuis longtemps dans un col à ce moment là. Hier, j'ai vu des camions Radioshack à Briançon, et aujourd'hui ce type me double avec un équipement haut de gamme, un vélo Trek et un maillot Livestrong. Il me salue avec un fort accent et je ne peux m'empêcher de penser qu'il ne s'agit pas d'un promeneur comme un autre... Je tente de le suivre quelques mètres avant de réfléchir : si ce mec est un professionnel, me voir le suivre risque de lui mettre un coup au moral, de lui faire perdre des courses, de l'entrainer dans une dynamique négative, et de lui faire rater sa carrière et sa vie. Je ne peux m'y résoudre. Je le laisse donc sagement s'éloigner...
Une nouvelle pause de 10min 3km plus loin pour laisser passer un grain. Mais le grain ne passe pas et je repars sous la pluie. Je trouve petit à petit de meilleures sensations, mais la pluie s'intensifie et je commence à redouter la descente qui s'annonce. Je finis ce col mythique vers 11h45 après 1h40 environ sur le vélo.

La vue devait être magnifique, mais les nuages qui l'entourent cachent tout. Je prends ma traditionnelle photo au sommet et je m'habille rapidement pour ne pas avoir froid trop longtemps.

Dans la descente, la pluie est toujours aussi forte, l'eau ruisselle sur la route, et je roule très lentement. Trop pour me réchauffer. J'ai froid aux pieds, aux jambes et aux mains. Heureusement, j'ai le buste bien couvert, ce qui limite les risques de tomber malade. Je ne supporte plus le froid et je m'arrête dans le premier bar vers 1700m.

Un chocolat chaud et un sandwich au bleu (enfin un fromage avec du goût !) me font du bien. En partant, un gars du coin me dit que la pluie sera moins forte vers me sud. Mouais... Comme les bretons qui te disent que la marée va chasser les nuages... alors que les nuages ne partent jamais !

En repartant, je fais un petit sprint à 71km/h pour me réchauffer sur une des rares lignes droites. En après quelques kilomètres, alors que je n'y croyais plus, le soleil se montre et la pluie cesse. Je trouve même quelques routes sèches !

Je passe par les magnifiques gorges du Guil, dans le parc du Queyras, au fond duquel le torrent dégage une énergie impressionnante. Et à Guillestre, j'enlève enfin ma polaire et mon manteau pour attaquer le col de Vars (2110m, 1100 de D+). Il est 13h55.

En partant, un autre cycliste enclenche la discussion. Nous parlons d'abord de mes 15kg de bagages, puis je découvre qu'il est lui aussi triathlète. Et il m'apprend aussi qu'il a participé à l'Embrunman 2010 ! Nous discutons pendant une dizaine de minutes puis je reprends mon rythme, apparemment inférieur au sien. Mais malgré mon lourd équipement, il ne me distance pas et je le rattrape même un peu avant qu'il ne fasse demi-tour. Encourageant donc, puisqu'il s'agissait seulement de sa première montée. Je continue et je traverse Sainte-Marie, puis Vars, la station des Marseillais.

Le col est assez irrégulier et la pluie est revenue dans les 5 derniers kilomètres. Je suis content de le finir. Au sommet une dizaine de 2cv sont réunies. Une des conductrices me prend en photo devant le panneau du col (c'est tradi !) et je commence une nouvelle descente sous la pluie vers 15h45.

 


Au sommet du col de Vars

 

J'arrive à Jausiers à 16h30 et je vais prendre possession de ma chambre d'hôtel. Mais les quelques éclaircies et le faible dénivelé positif du jour me donnent envie de repartir. Je laisse mes affaires inutiles pour la montée à l'hôtel et je repars avec uniquement vêtements chauds et outils. Je commence par prendre un bon ravitaillement, puis je débute le col de la Bonette (2693m, 1500 de D+ en 23km). Environ la difficulté du Ventoux, mais beaucoup plus haut !

J'hésitais entre ce col et le col de la Couillole pour demain, et cela me permettra d'avoir fait les deux !

Mais je dois finir ce long col en temps limité puisque je dois être de retour avant 20h15 pour manger à l'hôtel. Je m'arrache donc, en limitant les pauses et en tentant de gérer l'effort au mieux. Je monte 800m la première heure. Compte tenu de ma fatigue, je suis satisfait. Mais la seconde heure est plus difficile. Peut-être l'altitude. Peut-être aussi l'irrégularité de la pente qui passe facilement de 5 à plus de 10% en quelques mètres. Par chance, le ciel est assez dégagé, les paysages sont magnifiques, et je croise de nombreuses marmottes qui me regardent passer sur le bord de la route. Jamais assez longtemps pour que je puisse sortir mon appareil photo.



Vue depuis la montée du col de la Bonette, vers 1800m.

 

A 6km du sommet, la pluie revient avec intensité, accompagnée du vent puis du brouillard. J'hésite à faire demi-tour. Je suis à bout de force, au bord des crampes, et je commence à avoir froid ! Mais la pente commence à se radoucir et les trois derniers kilomètres sont plus cléments. J'atteins le col à 19h25. La route qui mène 1km plus loin à 2802m d'altitude (la route la plus haute d'Europe, parait-il) est encore recouverte de neige. Je prends quelques photos et je redescends.

Malgré la pluie dans la partie haute, j'ai moins froid qu'en début de journée. J'ai pris confiance en ma tenue de route sur sol mouillé et je fais belle descente sur la route très sinueuse qui me ramène à l'hôtel. Mais alors que j'allais arriver largement dans les temps, je me retrouve coincé derrière un troupeau de mouton à l'entrée de Jausiers ! Je mets 10min à trouver la brèche pour doubler ces 500 bêtes qui occupent toute la route et mangent tout ce qui dépasse des jardins. J'arrive in extremis à l'hôtel. Tout juste le temps de prendre une douche et d'arriver encore grelotant dans le restaurant.



La route fermée au sommet du col de la Bonette


10h30 se sont écoulées entre mon départ et mon arrivée. J'ai parcouru 140km, quasiment uniquement en côte, pour un dénivelé total de 3850m ! Il s'agit de mon nouveau record. Une belle performance, d'autant que j'ai franchi 3 cols de plus de 2000m (j'en avais franchi 3 autres avant aujourd'hui, dont le Galibier hier...) et je ne suis pas descendu sous 1050m d'altitude. Mes ressources en oxygène étaient donc un peu plus limitées que d'habitude.

Demain, j'aurai encore une petite étape, et certainement l'occasion d'ajouter une ascension supplémentaire ! Je rêve d'une météo agréable pour profiter des paysages du Mercantour, et pour ne pas avoir, comme aujourd'hui, tous mes vêtements propres trempés dans mon sac...

Tag(s) : #Route des Grandes Alpes